Dans Noces, recueil de textes autobiographiques publié en 1938, Albert Camus puise au cœur de son Algérie natale, dans la beauté solaire des ruines romaines de Tipasa et de la Méditerranée, pour nous livrer avec une acuité inégalée les termes de son rapport à la mort: "C'est dans la mesure où je me sépare du monde que j'ai peur de la mort, dans la mesure où je m'attache au sort des hommes qui vivent, au lieu de contempler le ciel qui dure". En quelques pages lumineuses, alors qu'il n'est encore qu'un jeune homme de 23 ans, Camus nous dit tout de ce chapitre universel: de nos peurs et de nos refuges pour leur faire face, de celui qui part et de ceux qui lui survivent, des lieux et des rites de ce passage.
S'il appartient à chaque personne d'affronter librement le terme de sa propre existence, à sa façon singulière, par ses croyances et par ses convictions, c'est à la collectivité qu'il revient de se tenir aux côtés de ces "hommes qui vivent", de celles et ceux qui restent, pour les accompagner avec respect et tolérance dans leur deuil et le souvenir des êtres aimés. La ville bienveillante que je souhaite construire avec les Parisiens ne saurait ignorer cette question de la mort d'un proche et du deuil, dont nous avons chacun fait l'expérience.
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