"Touche pas à ma pute", tel est l'intitulé d'une pétition qui sera publiée dans Causeur de novembre. Elle est le porte-étendard du "Manifeste des 343 salauds". Voilà un acte militant inédit : les hommes n'avouent pas aisément fréquenter les putes. Et se préoccupent plus d'utiliser ces dames que de les défendre.
Mais ce manifeste va encore plus loin, et se réclame paradoxalement d'un autre manifeste célèbre : celui des "343 salopes", publié en avril 1971 dans Le Nouvel Observateur, pour défendre la liberté d'avorter ("Je déclare avoir avorté"). Je suis, avec d'autres, à l'origine de ce manifeste. Une précision utile : nous n'avions pas choisi de nous appeler "salopes", ce qualificatif nous est venu du dehors, deCharlie Hebdo. Si on comprend bien, le terme de "salope" désignerait donc toute femme qui enfreint les règles de la bienséance féminine officielle, pute ou féministe.
Dans le manifeste "Touche pas à ma pute", les signataires eux, ont choisi le terme de "salaud" par référence aux "salopes" de 1971. C'est là que je m'interroge. Quelle filiation peut-il bien y avoir entre nous, les "salopes" qui réclamions la liberté interdite de disposer de notre corps, et ces "salauds" qui réclament aujourd'hui la liberté de disposer contre rémunération et sans pénalité du corps de certaines femmes ? Dans le premier cas, il s'agit de lever une oppression, dans le second, de la reconduire. Et ce au nom du même concept : la liberté. Où est la faille ?
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