Après plusieurs mois d’incertitude, la salle de shoot qui doit voir le jour à Paris, la première en France, a enfin un lieu d’implantation près de la gare du Nord, dans une zone relativement dépourvue d’habitations, mais qui ne fait pas l’unanimité des riverains.
La SNCF a mis à la disposition de la ville de Paris pour trois ans un terrain situé au 39 boulevard de la Chapelle, dans le nord-est de Paris, a annoncé jeudi le maire PS du Xe arrondissement, Rémi Féraud.
Le site, en contrebas du boulevard, non loin des voies ferrées et du métro aérien, est actuellement occupé par un parking d’une quinzaine de places et un petit bâtiment préfabriqué.
Un autre bâtiment préfabriqué d’environ 200m2 y sera construit à la place pour accueillir en même temps une vingtaine de toxicomanes et entre 100 à 150 par jour. La salle sera gérée par l’association Gaia-Paris et devrait ouvrir sept jours sur sept.
Le gouvernement avait donné en février son feu vert à l’expérimentation de cette «salle de consommation à moindre risque». Rémi Féraud espère l’ouvrir à l’automne.
Le maire voulait qu’elle se situe «dans le quartier gare du Nord-hôpital Lariboisière», où se concentrent de nombreux toxicomanes de rue précarisés, à qui elle est destinée. Elle doit leur permettre de consommer leurs drogues sous supervision de personnels de santé et de réduire les troubles à l’ordre public.
Ce lieu «était considéré par l’ensemble des partenaires comme le plus adapté», a assuré M. Féraud, car il est «suffisamment éloigné des lieux d’habitation, des écoles, des commerces, pour ne pas créer de nuisance sur la voie publique».
Situé à 800 mètres de l’entrée de la gare du Nord, le terrain est actuellement interdit à toute personne étrangère à la SNCF. L’accès sera séparé en deux entrées distinctes, l’une pour la salle de consommation, l’autre pour les employés des structures SNCF voisines.
«Le quartier va perdre beaucoup»
Pour Myriam El Khomri, adjointe au maire de Paris chargée de la sécurité, «l’objectif c’est d’éviter la stagnation de toxicomanes sur la voie publique. Ce sera le cas, puisque c’est en contrebas».
Pour «éviter la présence de toxicomanes dans des halls d’immeuble, des équipements publics comme les squares ou des parkings», la salle sera accompagnée «d’un dispositif de police spécifique et fidélisé au quartier pour qu’il n’y ait pas de trafic à proximité de la salle», a-t-elle ajouté.
«Cette salle sera implantée dans un quartier déjà frappé par de multiples trafics et délinquances», a dénoncé Serge Federbush, conseiller UMP du Xe, qui avait organisé une votation contre le projet.
Mais M. Féraud dit avoir la certitude qu’une «partie importante des habitants du quartier est favorable au projet». «Si c’était un échec, s’il y avait des problèmes supplémentaires, nous arrêterons l’expérience», affirme l’édile, qui organisera une réunion publique le 11 juin.
Marpessa Randolph, 37 ans, qui habite au 39 du boulevard, se dit «pour la salle de shoot» car «c’est un quartier où il y a beaucoup de personnes visiblement dépendantes et dans la détresse». Mais «il faudra des assurances en termes d’encadrement et de sécurité du lieu», affirme cette mère de famille.
«C’est mieux d’avoir une salle que de se shooter dans la rue», ajoute Ahsen, qui habite depuis 11 ans au numéro 37. «Mais cela va inquiéter les gens qui vont au théâtre des Bouffes du Nord, juste à côté, et les touristes qui passent par là pour aller à Montmartre», dit-il.
«Le quartier va perdre beaucoup», affirme aussi Hany Shéhata, directeur d’un hôtel trois étoiles situé dans une rue mitoyenne. «On s’attend à une perte énorme, peut-être à une fermeture, alors que le quartier commençait à se développer», dit-il.
Quand à Maryvonne, riveraine venue repérer les lieux, elle se dit satisfaite de voir que la salle de shoot sera «moins près» de chez elle qu’elle ne le pensait.
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